Tout au long de l’article, le terme « Gaylord » sera abrégé par « GL« 

Les Gaylords sont un des gangs les plus anciens de Chicago et l’on va donc remonter jusque dans le milieu des années 1930 à Noble Square, dans le secteur de West Town (nord-ouest de la ville). C’est à ce moment que naît le « Postal Athletic Club«  et s’engage dans le domaine du sport. Ils étaient considérés comme une « association sportive et sociale » (S.A.C en anglais) et ne faisaient rien d’illégal. Il faut bien préciser que durant leurs 25 ans d’existence, le PAC n’a jamais été impliqué dans des affaires criminelles et ne peut pas être considéré comme un gang. Ils avaient même un magasin de produits dérivés et une salle des trophées pleine à Noble Square. Dans la fin des années 40, ils ont crée les « Junior Postals« , une cellule destinée à sortir les enfants des rues et leur changer les idées. Les jeunes du quartier appréciaient particulièrement le basket-ball et le softball.

Nous allons maintenant ouvrir une parenthèse et nous rendre à Little Village, en 1950. C’est durant cette année que le gang de bikers des Outlaws ouvre un garage et un club house à l’intersection entre la 25th Street et Rockwell Street. Les Outlaws ont décidé de quitter leurs anciens locaux de McCook, en banlieue de Chicago, car le nombre de membres grandissait et ils avaient besoin de plus de place. Leur arrivée fut accompagnée de puissants bruits de moteurs qui retentissaient dans tout le quartier. À l’époque, le gang était composé de blousons noirs (bande de voyous blancs aux idéologies parfois anarchistes ou racistes), âgés de 30 ans au plus. En très peu de temps, beaucoup d’habitants voyaient leur présence d’un mauvais œil, ils étaient considérés comme des étrangers qui ne faisaient rien de leurs vies. C’est alors qu’une bande de jeunes âgés d’une vingtaine d’années en a eu assez des Outlaws et ils ont décidé de créer un gang pour leur tenir tête : les Gay Lords. Les Gay Lords de Little Village furent les premiers à adopter ce nom, alors que les Junior Postals n’étaient toujours qu’une équipe de baseball. Rapidement, ils ont ouvert un garage de réparation de motos en face de celui des Outlaws, ce qui a envenimé les choses. Leur quartier général était situé au croisement entre la 24th Street et Whipple Street.

À l’intersection de ces deux rues, au 2358 South Whipple Street se trouvait une caserne de pompiers et, de l’autre coté de la route, il y avait un bar. On ne sait pas vraiment si certains Gay Lords étaient pompiers ou si ils étaient fils de pompiers, mais, ce dont on est sûr, est qu’ils se retrouvaient souvent le soir pour boire un coup au bar.

Le bar dans lequel se retrouvaient les Gay Lords

Maintenant, retournons voir les Junior Postals, du côté de Noble Square. Le début des années 50 marque un changement drastique chez les joueurs. En effet, ayant grandis et subissant la nouvelle mode des blousons noirs que les jeunes veulent imiter. Ils se mettent alors à boire, à insulter et à causer toutes sortes de problèmes. Alcoolisés, ils ont même saccagé des infrastructures et du matériel appartenant au club. Les dirigeants en ont eu assez et ont donc viré la bande de jeunes. Le groupe s’est structuré et Anthony Johnny Boy Anarina en a pris la tête, avec Bobby Shipball comme adjoint. En 1952, ils ont décidé de créer leur propre association sportive, sous le nom de « Gay Lords« .

Ces Gay Lords jouaient au basket-ball lors des saisons froides et, au printemps et en été, ils faisaient du baseball. Ils participaient à des tournois à l’église St. Mary et, d’après beaucoup, ils avaient un très bon niveau. N’ayant plus d’endroit où passer le temps, les joueurs se retrouvaient souvent devant un magasin de bonbons sur Huron et Throop Street. Mais, la vendeuse ne les laissait pas rentrer quand ils étaient trop nombreux donc, ils passaient la plus part de leur temps dehors. Alors, quand il faisait trop froid, ils partaient se réfugier au Eckhart Park afin de profiter de la chaleur de la salle de sport et de la salle de jeux. Les employés du parc étaient souvent en colère car les jeunes étaient bruyants, irrespectueux et destructeurs.

Corner entre Huron et Throop Street
Une carte du set de Huron Street des années 50 (d’après certains cela pourrait être la 1ère de l’histoire)
On voit aussi qu’ils avaient déjà une ébauche du logo adopté durant les années 60

Les Gay Lords portaient, pour la plus part, un gilet vert sur lequel était brodé leur logo : un crâne portant un haut-de-forme, un bouclier, une bouteille de whisky, un dé et une canne. Le club était composé majoritairement de blancs (Polonais, Italiens et Allemands) mais, il y avait aussi quelques latinos (Mexicains).

Carte de membre de l’association sportive des Gay Lords de 1954

Retournons à Little Village, en 1954. Un article du Chicago Tribune datant du 3 Mars, parle d’un match de basket-ball qui aurait eu lieu entre les Outlaws et les Gay Lords (le gang de bikers, à ne pas confondre avec l’association sportive des Gay Lords). Le match a eu lieu au 2300 South Lawndale Avenue et s’est soldé sur un score de 58 à 56 en faveur des Gay Lords. Après le match, une bagarre impliquant 60 personnes a éclaté. La police fut appelée lorsque 50 autre Outlaws ont débarqué pour en découdre. Au final, seul quatre Gay Lords et un Outlaw furent arrêtés. D’après les rapports de la police, les quatre GL avaient entre 16 et 19 et ils habitaient tous à Little Village. L’article fait aussi état de plusieurs autres bagarres qui étaient plus violentes depuis que les deux gangs approchaient de la barre des cent membres.

Article du Chicago Tribune en question

Ils avaient pour habitude de traîner au croisement entre 24th Boulevard et Marshall Boulevard, en face de l’école primaire John Spry. D’ailleurs, cette intersection est très importante dans l’histoire des gangs car, environ 10 ans plus tard, c’est aussi là-bas que « White Sal » créera les « MarKings« , un des premiers sets des Latin Kings (l’article sur l’histoire des Latin Kings est disponible ici). Beaucoup de Gay Lords étaient scolarisés au lycée Harrison qui était juste à côté.

John Spry Community School

Les Gay Lords de Little Village étaient pour la plupart originaires de Pologne ou de Bohême (région au centre de l’Europe) alors que les Gay Lords de Noble Square étaient majoritairement Italiens ou Mexicains. De plus, les GL de Little Village portaient du gris et du bleu, couleurs qui deviendront plus tard les couleurs officielles des Gaylords. Dans leur garage, les GL étaient des mécanos qui réparaient et conduisaient des Cushman ou des Whizzer.

Durant le milieu des années 50, les GL ont beaucoup recruté dans les écoles environnantes et ils ont vite dominé le lycée Harrison ainsi que le JROTC (programme Junior d’entraînement des officiers de réserve de l’armée, programme qui a pour but d’informer et de former les élèves intéressés par une carrière militaire).

Carter Harrison Technical High School
Une classe de JROTC d’Englewood

Dans l’histoire des Gay Lords on a aussi, en 1954, la création d’une nouvelle association sportive sous le nom de « Gay Lords« . Ce groupe s’est installé dans le quartier de Near West Side, au croisement entre Ashland Avenue et Taylor Street. Ils jouaient au basket-ball, au baseball, au football, au bowling et donnaient des cours de danse. Personne ne sait vraiment si les membres étaient d’anciens membres des autres Gay Lords, mais, si il y a une chose certaine, c’est que, tout comme les deux autres groupes, ils étaient à fond dans le sport. De plus, tout comme les GL de Noble Square, ils étaient composés en majeure partie d’Italiens. Les Gay Lords de Taylor Street ne se sont jamais vraiment battus contre des bandes rivales, contrairement aux GL de Little Village et de Noble Square qui ont, au fil du temps, combattu les Latin Kings. Même si c’est parfois compliqué de s’y retrouver entre toutes ces factions, cela nous montre tout le cheminement afin de passer des « Gay Lords » aux « Gaylords« .

Vers la fin des années 50, les Gay Lords de Little Village ont grandi en taille et contrôlaient alors un territoire qui s’étendait de 21st Street à 26th Street et entre Marshall Boulevard et Whipple Street. C’est aussi à ce moment là que les GL sont montés en gamme et se sont procurés des Harley Davidson. Grâce à ces nouveaux engins, les Gay Lords sont devenus les rois du lycée Harrison et ont eu toutes les filles à leurs pieds. Ceci a provoqué une très forte jalousie chez les Outlaws et, par conséquent, les affrontements ont repris plus violemment. Les GL sont aussi entrés en guerre contre les Vice Lords, les Egyptian Cobras et les Roman Saints car ils essayaient de s’installer sur leur territoire.

Durant la fin des années 50, les Gay Lords de Noble Square se sont développés et sont devenus un groupe important au sein du lycée Wells, situé dans le quartier d’East Village. À l’époque, c’était les gangs italiens comme les Gay Lords, les C-Notes, les Dominos et les Lazy Gents qui contrôlaient la zone. Les autres jeunes se sont alors regroupés et ont formé les Ventures et les Playboys afin de contrer les italiens. Ces conflits entre polonais, irlandais et italiens sont nés surtout pour des histoires de filles.

Début 1960, les Gay Lords occupaient toujours Little Village et avaient comme objectif de récupérer le territoire de Marshall Square, qui appartenait aux Satan Disciples. Ils ont donc commencé une nouvelle guerre.

À l’époque, les Gay Lords de Noble Square comptaient entre 30 et 40 membres, mais, c’était très compliqué de savoir qui était vraiment impliqué dans le gang. Dans une interview réalisée en 1961, le chef des Gay Lords dit que, même lui, ne sait pas exactement combien il y a de membres. Leurs ennemis principaux étaient les Playboys, les Sons of Satan Slaves (les Ventures), Pulaski Park, les C-Notes, les Spanish Lords et les Imperials (qui deviendront ensuite les Latin Kings). Les GL ont ensuite ouvert deux sets au nord, dans le secteur de West Humbold Park : au croisement entre Augusta Boulevard et Monticello Avenue et entre Springfield Avenue et Le Moyne Street. Cette expansion était vitale car des familles portoricaines arrivaient et les Imperials commençaient à s’installer, ils ne devaient donc pas leur laisser d’espace libre.

Comme à l’époque où les Gay Lords n’étaient qu’un club sportif, il y avait une équipe de GL Juniors et une équipe de GL Séniors. De plus, c’est au début des années 60 que l’on peut voir la transition du nom « Gay Lords » à « Gaylords« . Personne ne sait vraiment pourquoi ils ont changé mais, ce qu’il faut savoir, c’est qu’à cette époque le terme « gay » ne faisait nullement référence à l’homosexualité et désignait quelqu’un de joyeux ou d’heureux. D’ailleurs, ce terme était très courant dans les titres de films, de livres ou les enseignes de magasin. Un autre gros changement qu’il y eu à ce moment est le changement de logo. En effet, le crâne et les bouteilles de whisky furent remplacés par une croix celte avec une sorte de flamme ou de rayon de soleil. Ils ont aussi adopté un slogan : « God forgives, Gaylords don’t » (Dieu pardonne, pas les Gaylords). Aussi, pour l’anecdote, la légende veut qu’un des chefs du groupe à l’époque ait lu un livre sur la famille française « Gaillard » (traduit « Gaylord » en anglais ») et ait choisi d’adopter ce nom, toutefois, il faut prendre cette information avec des pincettes.

En 1963, les Gaylords de Little Village devaient faire face à un nouveau problème à l’intersection entre la 24th Street et Marshall Boulevard. Les premières familles mexicaines arrivaient dans le quartier et, rapidement, le premier gang mexicain a vu le jour pour se défendre des GL et des Satan Disciples. Ces enfants scolarisés à l’école John Spry se sont appelés les « MarKings » (les rois de Marshall Boulevard). Les Gaylords étaient furieux de voir ces jeunes prendre possession de leur territoire et il y eu donc de nombreux affrontements, surtout chez les Gaylords Junior.

Un an plus tard, soit en 1964, les MarKings se sont réunis avec les Imperials et d’autres gangs du nord pour former les « Latin Kings » (vous pouvez lire l’histoire des Latin Kings en cliquant ici). Les Latin Kings étaient nombreux, et très coriaces. Pratiquement chaque groupe de Gaylords en ville était en guerre contre des LK. C’est surement à ce moment que les Gaylords ont décidé d’unir leurs forces et de créer un seul grand groupe. De plus, même si les Latin Kings étaient surtout présents au nord, les GL du sud n’étaient pas épargnés puisqu’il n’était pas rare de voir des équipes de LK descendre du nord pour aider les petites factions au sud. Pour faire simple, la création des Latin Kings n’a pas du tout arrangé les Gaylords et les a contraint à être plus présents dans la rue.

Pour ne rien arranger, les Latin Kings se sont alliés avec les Warlords et les Spanish Lords en 1964 et ont formé les « United Neighborhoods« . Les Italiens, Irlandais, Polonais et Allemands ont senti le vent tourner donc les Gaylords ont décidé de faire la paix avec les C-Notes et les Gents afin de créer l’alliance des « G.C.G« . Cette rivalité entre deux alliances est l’une des plus ancienne de la ville. Quelques mois plus tard, les Ventures, les Playboys et Pulaski Park ont décidé de faire de même et de s’allier pour former les « P.V.P« . Les trois alliances menaient une guerre sans mercis, ce qui a eu pour conséquence de resserrer les liens entre les gangs de chaque groupe. Une sorte de fraternité entre les C-Notes et les Gaylords est née.

Durant le milieu des années 60, alors que les Gaylords cherchaient un moyen de se renforcer au nord, le début de la Guerre du Vietnam a sonné la fin des Gaylords de Little Village. En effet, comme expliqué plus haut, les GL de Little Village avaient beaucoup recruté dans le JROTC (programme Junior d’entraînement des officiers de réserve de l’armée), ce qui signifie que beaucoup avaient toujours le sentiment de devoir servir leur pays. Ainsi, la plus part des Gaylords de la 24th Street et de Marshall Boulevard sont partis au front, laissant la zone complètement libre aux Latin Kings. Les quelques GL restants de la zone ont déménagé vers d’autres sets qui n’avaient pas étés désertés.

Alors que les derniers Gaylords de Little Village partaient, un GL habitant au croisement entre la 18th Street et Western Avenue (dans le quartier du Heart of Chicago) a fait connaissance avec une bande de 3 jeunes irlandais. Ils faisaient partie d’un groupe qui avait pour habitude de trainer sur Garfield Boulevard et Halsted Street, devant le bar et salle de jeux de Big Jim (une grosse tète de la Mafia de Chicago qui a ouvert de nombreux commerces pour blanchir son argent). Ce gang s’appelait les « Halsted Street Hustlers » et avait été crée pour contrer les gangs afro-américains d’Englewood qui arrivaient dans le quartier. Ils se battaient aussi contre les Latin Souls, un gang de mexicains et de portoricains, et les Burger King Boys (ils avaient adopté ce nom car ils trainaient devant le Burger King de Garfield Boulevard). La plus part des bagarres étaient dues à des guerres de territoire. Les Halsted Street Hustlers étaient tous passionnés de musculation et ils se rendaient à la salle de Sherman Park. De plus, beaucoup de Hustlers habitaient à West Englewood (qui était, à l’époque, majoritairement composé de blancs) et donc, voulant se rapprocher de chez eux, ils se retrouvaient de plus en plus à Sherman Park.

James « Big Jim » Colosimo

C’est donc après quelques jours de discussions que Joe S, Sam Smith et Johnny G furent les premiers Halsted Street Hustlers à rejoindre les Gaylords et, ainsi, ouvrir la première branche GL dans le quartier du Back of the Yards. Rapidement, tous les Hustlers ont rejoints les Gaylords et ont repris la guerre face aux Burger King Boys afin de conquérir l’intersection entre la 55th Street et Ashland Avenue. Les GL de cette zone ont aussi affronté des Black P. Stones lors de fusillades, de descentes armées, ou de bagarres générales dans West Englewood. Quelques temps plus tard, ce sont les Devil’s Disciples qui sont venus s’ajouter à la longue liste des ennemis des Gaylords, si bien que rapidement, les GL et les Disciples ont fait une trêve afin d’allier leurs forces contre les Stones. Il y eu aussi quelques rixes avec les Saints and Cornell Dukes, les Outlaws MC et les Latin Souls. Malgré ça et grâce à leur habilité au combat, les Gaylords du Back of the Yards ont agrandi leur territoire et, la plus part des jeunes blancs jusqu’au sud de Marquette Park voulaient entrer dans le gang.

C’est aussi dans ces années que les Gaylords sont arrivés jusqu’à l’intersection entre Palmer Street et California Avenue, dans le quartier de Logan Square. Sur place, ils ont convertis les Almighty Insane Stooges et ont ainsi crée le premier set GL de ce secteur.

Une carte de membre du gang des Almighty Insane Stooges

Il y a des rumeurs qui disent que les Gaylords ont dépassé les 1000 membres durant la fin des années 60, mais encore une fois, il est très compliqué de connaitre les vrais chiffres. Même si c’est au nord que les GL ont toujours été plus fort, à cette époque c’était au sud qu’ils étaient plus nombreux, surtout dans le Heart of Chicago. Les membres de Noble Square et d’East Village avaient grandi et étaient devenus les blousons noirs (« greasers » en anglais) les plus puissants de l’histoire de la ville. Ils n’hésitaient pas à aller sur le territoire ennemi pour tout saccager. De plus, leurs pratiques barbares terrorisaient leurs rivaux. En effet, ils étaient violents et ils avaient pour habitude d’attacher les corps de leurs ennemis décédés à leur pare-chocs arrière, puis de les traîner le long de la rue. Aussi, les Gaylords étaient connus car souvent, ils attachaient des cadavres de Latin Kings à des arbres de Humboldt Park. Cela envoyait un message fort aux personnes qui voulaient entrer en guerre contre eux. Il y a des témoignages d’ancien rivaux des Gaylords qui disent que durant cette période ils ont perdu beaucoup d’amis et que parfois cinq voitures pleines de GL débarquaient dans leur quartier pour passer à tabac des dizaines d’entre eux. Les ennemis principaux étaient les Latin Kings et tous les autres gangs portoricains, alors que la guerre contre l’alliance P.V.P s’essoufflait.

En 1969, la plupart des familles portoricaines de la ville ont déménagé à Logan Square et Albany Park. Cela a provoqué un énorme changement démographique et économique. En effet, ces quartiers majoritairement blancs furent rapidement confronté à la pauvreté des familles hispaniques. Cela a causé la fuite des familles blanches de classe moyenne, voire aisée. Ainsi, les familles blanches pauvres ont vite été en sous nombre et ce fut le début de temps très compliqués pour eux. Les portoricains ont vite installé des réseaux de drogue et de prostitution, leur permettant de gagner un peu d’argent. Aussi, ces jeunes latinos qui étaient autrefois en minorité et discriminés, se retrouvèrent en surnombre et se sont défoulés sur les jeunes blancs du quartier. L’arrivée des Latin Kings, des Spanish Cobras et la création des Imperial Gangsters n’ont bien évidement rien arrangé. Ces jeunes blancs se sont alors tournés vers les Gaylords et ont demandé leur protection. Dans ces quartiers, les GL étaient vus comme de véritables anges-gardiens car ils avaient une sorte de « fierté blanche » qui les poussait à venir en aide aux familles blanches en détresse. Par exemple, ils n’hésitaient pas à escorter les enfants pour aller ou revenir de l’école, ou de les surveiller quand ils sortaient jouer dehors. Par contre, il ne faut pas confondre cette « fierté blanche » avec du « suprématisme blanc » car ils ont plusieurs fois chassés des néo-nazis qui voulaient rejoindre le gang ou qui s’en prenaient à des familles de couleur. Ainsi, les Gaylords sont devenus plus respectueux et se sont fait bien voir des familles hispaniques. En effet, dès les débuts à Noble Square, ils y eut des mexicains dans le gang, mais cet épisode a poussé d’autres latinos à rejoindre les GL et à s’installer sur leur territoire.

De plus en plus de communautés ouvraient leurs portes aux Gaylords afin que ceux-ci s’occupent de protéger leur quartier et relancent l’économie. Ils ont donc pu ouvrir un set dans le secteur de BelmontCragin, à l’intersection entre la Cicero Avenue et School Street. Les GL étant des fervents américains et ayant un sentiment de « devoir citoyen », ils ont pris cette mission à cœur et ont entamé une réelle campagne pour conquérir et aménager le plus de quartiers possible.

Cette campagne a débuté dans Kilbourn Park, parc situé à la frontière entre les quartiers d’Hermosa et d’Irving Park. Les Gaylords sont arrivés en 1969 et ont directement entamé une guerre avec les Almighty Popes (Insane Popes) qui avaient la mainmise sur le parc. Le combat fut assez expéditif et les GL ont facilement récupéré le territoire. On eu alors la création d’un set très puissant et très influent : les Kilbourn Park Gaylords (KPGL). Après cette grande victoire, tous les jeunes du quartier et des écoles environnantes ont rejoint les KPGL. Les membres de ce set ont, à eux seuls, récupéré une dizaine d’intersections mais furent stoppés par les Spanish Cobras au niveau de Kelvyn Park (le quartier général des Cobras).

Toujours en 1969, les Kilbourn Park Gaylords sont partis rendre visite aux Palmer Street Heads, un gang de Logan Square. Les KPGL allaient souvent jouer au bowling à 20th Century Lanes, une salle de jeux située au 3253 North Cicero Avenue. L’établissement se situant sur le territoire des Palmer Street Heads, les KPGL ils leur ont fait comprendre que s’ils ne rejoignaient pas les Gaylords, ils allaient devoir prendre la zone de force. Les Heads n’ont pas hésité et ont ainsi permis aux Gaylords d’agrandir leur emprise sur le secteur de Belmont-Cragin.

20th Century Lanes
Une carte de membre du gang des Palmer Street Heads

La création des Kilbourne Park Gaylords a donc permis d’étendre l’influence des GL à l’ouest et à l’est. Ainsi, ils ont agrandi leur territoire et ont notamment récupéré Blackhawk Park, le bowling de Manor Bowling Alley situé au 3124 North Central Avenue et l’intersection entre Palmer Street et California Avenue. Une petite faction s’est alors crée : les Palmer Gaylords (PGL). Les PGL ont d’abord étendu le territoire de leur set le long de Palmer Street jusqu’à Sacramento Avenue. Ils ont ensuite fait comme les KPGL et entrepris une campagne pour augmenter le territoire des Gaylords. Ils ont ainsi ouvert cinq sets dans le secteur de Logan Square, dont un dans le quartier de Bucktown. Mais, malgré le fait que les PGL étaient de redoutables ennemis, leur progression fut ralentie à Logan Square.

Après s’être aventurés dans les secteurs d’Irving Park, d’Hermosa, de BelmontCragin et de Logan Square, les Gaylords sont ensuite arrivés à Austin (secteur au nord ouest de Chicago). Ils sont donc entrés en guerre contre les Vice Lords et les Black Gangster Disciples, deux gangs afro-américains. En 1969, ils ont tout de même reussi à récupérer deux intersections non loin de Moore Park.

Ils sont ensuite arrivés dans le secteur délabré d’Uptown, rempli de bâtiments en ruine et de débris en tous genres. Il y avait beaucoup de sans-abris et de mendiants en manque d’alcool ou de drogue. Uptown était un parfait exemple de ce manque d’argent qui touchait toutes les ethnies et, surtout les amérindiens qui venaient d’arriver dans le quartier.

L’immigration massive de familles afro-américaines et portoricaines à Uptown a provoqué un choc des cultures, ainsi que des petits gangs. En effet, les afro-américains ont apporté des Black P. Stones, des Black Gangster Disciples et des Vice Lords, alors que les Latin Kings arrivèrent à cause des latinos. C’était alors une occasion parfaite pour les Gaylords de s’installer dans le quartier et de recruter des soldats voulant protéger leur quartier. Le premier set a ouvert a l’intersection entre Sunnyside Avenue et Magniolia Avenue. Ce groupe s’est battu bec et ongles avec les Latin Kings de la zone durant plusieurs années, avant de plier. Mais rapidement après, un set tout aussi fort a été crée au croisement entre Wilson Avenue et Dover Street : les Dover Lords.

Les Gaylords de Sunnyside et Magniolia

La pauvreté a été un facteur très important pour l’expansion des Gaylords, surtout en 1969 où, comme on a pu le voir, ils ont pris une très grande ampleur et ont beaucoup recruté. Ils ont gagné en territoire partout en ville, sauf à West Town, leur secteur d’origine. En effet, cela est dû au fait que les Gaylords ont tué un Latin Kings très apprécié, du nom de Juan Rivera. Juan était un habitant et un membre respecté donc les Latin Kings ont mené la vie dure aux GL. Les habitants, majoritairement portoricains se sont aussi ralliés aux LK et les Gaylords ont commencé à reculer.

Cette puissance soudaine leur a permis de faire une trêve durable avec l’alliance P.V.P (Playboys, Ventures et Pulaski Park). Les Gaylords, les C-Notes, les Lazy Gents, les Taylor Jousters, Chi-West ainsi que les membres de P.V.P ont donc formé une sorte de grande fraternité.

Alors que les années 70 débutaient, les Gaylords étaient en train de devenir des poids lourds de la ville et un des gangs les plus puissants. La population de tous les secteurs les plus pauvres de la ville changeait et les blancs étaient de moins en moins nombreux. La mission des Gaylords était de ralentir ce phénomène, et pour cela, ils essayaient à la fois de chasser les gangs qui n’apportaient que du trouble, et en même temps de convaincre les familles blanches de rester pour continuer le combat. Il faut reconnaitre que jusque là ils réussissaient assez bien à contrôler l’immigration, sauf dans le quartier de West Town, qui avait été pris d’assaut par les Latin Kings.

Durant le début des années 70, « King Fish« , un Satan Disciple haut gradé fut convaincu de rejoindre les Gaylords car il ne supportait pas de voir son gang devenir majoritairement hispanique. Une dizaine de SD l’ont suivi et ont rejoint les GL. Ceci est un fait marquant car à l’époque, les gangs avaient beaucoup plus de valeurs qu’aujourd’hui et il n’était pas courant de voir des membres « switch » de la sorte.

En 1971 plusieurs réunions furent tenues entre tous les gangs blancs de la ville (surtout situés au nord) afin de régler le problème grandissant des gangs latinos, tels que les Latin Kings, les Spanish Cobras, les Latin Disciples, les Latin Eagles, les Imperial Gangsters, les Satan Disciples et bien d’autres. Le but était donc de créer une grande entente afin de tous se concentrer sur un ennemi commun. Ces meetings furent un succès puisque à la sortie on pouvait voir des membres des Simon City Royals serrer la main des Gaylords, et ainsi de suite (alors que ces groupes étaient en froid auparavant). L’alliance « White Power Organisation » (« WPO ») fut donc crée et a permis aux gangs blancs de gagner énormément de territoire. Les Almighty Popes ont pu ouvrir une dizaine de sets, les Simon City Royals sont devenus une vraie machine de guerre, les C-Notes se sont implantés dans de nouveaux secteurs, les Young Freaks (maintenant connus sous le nom de « Stone Freaks ») sont devenus un gang à part entière, les Taylor Jousters ont réussi à sortir de leur quartier de Near West Side et les Gaylords y ont beaucoup gagné aussi. Cela a duré environ quatre ans.

Logo de la White Power Organisation

En 1971, les Gaylords sont partis du côté de Portage Park, quartier du nord ouest de Chicago, proche de Irving Park. Portage Park était une zone totalement blanche qui n’avait jamais été confrontée aux gangs et les GL étaient décidés à garder les choses en l’état. Rapidement, ils se sont développés à Ravenswood et à Winnemac Park (secteur de Lincoln Square). Ce set fut crée car les Maniac Drifters, qui occupaient la zone, mourraient à petit feu et les jeunes membres qui ne voulaient pas quitter la vie de gang ont rejoint les Gaylords. Ils ont donc fondé les Winnemac Park Gaylords. Un nouveau set a ouvert au 2100 West Eastwood Avenue, devant une caserne de pompier (qui a fermé depuis), ils se faisaient appeler les « Firehouse Gaylords« .

L’ancienne caserne de pompiers en question

En 1973, Chi West, les Taylor Jousters, les C-Notes, les Gaylords et les P.V.P ont participé à une réunion à Wicker Park, sur le territoire des Chi West (CW). Pour l’anecdote, les deux membres des CW qui gardaient la porte étaient armés d’arbalètes. Le but de cette rencontre était de créer la « UFO » (« United Five Organisation »), afin de, encore et toujours, ralentir voir stopper la progression des gangs latinos. Durant environ une dizaine d’années, ces gangs étaient extrêmement proches et cela leur a tous profité. Pour comprendre à quel point ils étaient puissants et déterminés, il faut savoir qu’il n’était pas rare de voir plus de 100 membres de la UFO sortir dans les rues pour tabasser tous les ennemis qu’ils voyaient. Ils portaient un brassard blanc pour montrer leur appartenance à l’UFO. Cette fraternité passait avant la WPO (White Power Organisation) car elle représentait bien plus a leurs yeux que le cessez le feu.

(de gauche à droite)
Sweat des Gaylords, membres de la UFO, sweat des Taylor Jousters, membres de la UFO, sweat des PV.P, membres de la UFO et sweat des Stone Freaks, proches de la UFO

En 1974, Albany Park se délabrait et les habitants étaient de plus en plus pauvres. Le paysage était constitué de bâtiments en ruine, de drogués en manque et de prostituées. Les appartements, laissés vacants par les familles qui avaient fuit la zone étaient squattés par des toxicomanes. Les seuls qui ont pu fuir cette misère étaient les familles blanches aisées, laissant derrière eux les blancs pauvres, les latinos et les afro-américains (à l’époque il n’y avait que très très peu d’hispaniques ou de noirs aisés). Les Latin Kings ont alors sauté sur l’occasion et ont envahi le quartier en quelques mois, pour le plus grand malheur des habitants. C’était très dur pour eux, qui avaient souvent vécu toute leur vie dans la zone, de voir leur quartier sombrer et tomber sous l’emprise des gangs. C’est alors que les Gaylords sont arrivés et se sont implantés devant l’école primaire de Haugan, au 4540 North Hamlin Avenue. Pas mal de jeunes ont rejoint leurs rangs (majoritairement des afro-américains et des blancs), ce qui leur a permis d’ouvrir un deuxième set dans le secteur.

Haugan Elementary School
Un panneau aux abords de l’école qui rappelle aux enfants de faire attention à eux et de rester en sécurité durant l’été…

L’année 1975 signifie la fin de la WPO, et cela est à cause 3 meurtres. Le premier meurtre se passe en Avril 1975, quand les Latin Kings ont assassiné « Bimbo« , le chef des Simon City Royals. Bimbo était un membre très intelligent qui savait à quel point l’alliance avec les Gaylords était vitale, ainsi, il faisait tout pour qu’elle perdure. Très peu de temps après sa mort, un groupe de Royals a kidnappé « Wizard« , un Gaylord, puis ils l’ont exécuté vers les rails de train à Kilbourn Park. La guerre était donc déclarée. Fous de rage et ne se contrôlant plus, les Gaylords ont abattu Larry « Larki » Morris, le leader des Insane Popes. C’est ainsi que, en l’espace d’un mois, c’est toute une alliance qui s’est effondrée. Il était maintenant impossible de voir des bandes de blousons noirs de gangs différents se rejoindre au Lenny’s Restaurant. En effet, des membres des Gaylords, des C-Notes, de P.V.P/P.V.R (entre temps, les Rice Boys se sont alliés avec les Playboys et les Ventures et ont formé une autre alliance), des Bel Airs, des Insane Popes, de Chi West et des Simon City Royals se retrouvaient très souvent pour partager un diner dans ce restaurant. Le vrai nom du restaurant était 4 Buddies, mais les membres de gang l’appelaient comme ça « par tradition ». De plus, pour rire, les membres qui avaient l’habitude d’y trainer s’étaient surnommés les « Lennies Storm Troopers« . La même année, la UFO a accueillie les Hell’s Devils et cela est devenu la UFO II.

Logo de la UFO II
Carte sur laquelle on peut lire « In Memory of Wizard« 
Ils avaient même crée une carte des Lennies Storm Troopers
Frank et Rose (au milieu), les patrons

En 1976, les Gaylords ont ouvert une nouvelle faction ultra-puissante dans le quartier de Logan Square, au croisement entre St Louis Avenue et Altgeld Street. Leur arrivée dans le secteur de North Center déclencha la guerre avec les Insane Deuces.

Durant la fin des années 70, le secteur d’Hermosa était lui aussi victime de changements et de déclin, notamment dû à l’immigration soudaine de familles hispaniques. Malgré ça, les blancs étaient toujours en supériorité numérique grâce aux Young Freaks, un gang d’européens qui faisait comme les Gaylords et qui veillait à ce que la population ne change pas trop. Pour cela, ils combattaient des Spanish Cobras et des Imperial Gangsters depuis 1971.

Plus tard, les Imperial Gangsters et les Spanish Cobras ont uni leurs forces contre les Young Freaks à Kelvyn Park car ils ont tous les deux rejoint la Folk Nation (quartier d’Hermosa). Les Freaks ont alors cherché un peu d’aide extérieure. Les Latin Kings étaient amis avec les Freaks et leur fournissait de la drogue, mais ils ne les soutenaient pas tant que ça dans leurs guerres. En 1975, les Gaylords leur ont donc offert leur aide en créant une nouvelle alliance : la « GFN » (« Gaylord Freak Nation ») et en les intégrant dans la UFO II, qui devint alors la UFO III en 1978.

Durant ces années, les Gaylords avaient un si grand élan et une si grande puissance que l’on peut dire de manière certaine, qu’ils étaient à leur apogée. Des données de l’époque montrent que les GL étaient le 4ème plus gros gang de Chicago et qu’ils avaient plus de 6000 membres. De plus, ils étaient de loin le plus grand gang blanc de la ville et le 2ème si on mélange les blancs et les latinos, juste derrière les Latin Kings. Après cette apogée qui dura environ jusqu’à la fin des années 70, les Gaylords ont amorcé un déclin, qui commença au sud.

En 1977, le set situé à l’intersection entre la 55th Street et Ashland Avenue a subitement fermé. Les zones environnantes étaient toutes devenues majoritairement afro-américaines et les dernières familles blanches ont déménagé en banlieue de Chicago. West Englewood n’était plus composé que de familles noires et, par conséquent, il n’y avait plus de Gaylords, pareil pour Marquette Park qui était partagé entre mexicains et afro-américains. De plus, la majorité des membres ont fini en prison ou accros aux drogues dures, ils se sont donc dissous et les quelques éléments actifs restants se sont répartis dans d’autres sets.

Les Gaylords avaient refusé de rejoindre la Folk ou la People Nation car ils haïssaient des gangs des deux côtés, les Latin Kings et les Simon City Royals étant leurs deux ennemis principaux. Bien sur, les LK avaient intégré la People et les Royals avaient rejoint la Folk. Les Gaylords avaient la UFO III avec eux et ils n’avaient besoin de personne, du moins pour l’instant. En effet, les hauts gradés GL qui étaient en prison furent vite sous pression et en sous-nombre (au début, le système de Folk et de People Nation fut crée uniquement pour les guerres de gangs en prison) et ils se sont rapprochés de la People Nation, par contrainte. Mais, cela ne s’appliquait que pour les GL enfermés, dans les rues cela ne changeait rien. Cela a duré jusqu’en 1981, année où beaucoup de chefs de gangs furent libérés et que les règles des deux alliances furent appliquées dans la rue. Ainsi, tous les Gaylords sont devenus membres de la People.

Carte de membre des Gaylords où on peut voir leur haine envers les Simon City Royals (représentés par le lapin)

Le choix fut difficile pour les membres de la UFO III mais était nécessaire s’ils ne voulaient pas disparaître. Ils ont donc choisi le moins pire des deux, même si cela demandait quelques concessions. Imaginez juste le nombre d’ennemis qu’ils avaient dans la Folk Nation : les Imperial Gangsters, les Spanish Cobras, Orquestra Albany, les Latin Eagles, les Simon City Royals, les Almighty Insane Popes et, au sud, les Satan Disciples. De l’autre côté, chez la People, il n’y avait que les Latin Kings avec qui ils étaient en vraie guerre, les autres ne les dérangeaient pas plus que ça. Tout de même, quel choc ce fut pour les Gaylords lorsqu’ils ont reçu l’ordre, de la part de leur hiérarchie, d’éviter à tous prix d’attaquer les LK. La seule faction qui ne respectait pas cet accord était le set de Seeley Street, à Lincoln Park, qui n’ont jamais pardonné le meurtre de « Honkey » par les Latin Kings.

L’année 1982 fut une année terrible pour l’alliance UFO III, et surtout pour la fraternité de très longue date entre C-Notes et Gaylords. Cette année, les GL commencèrent à grappiller du terrain dans le secteur de Portage Park et y ont récupéré deux parcs : Dunham Park et Merrimac Park, et ont ouvert plusieurs sets. Malheureusement, cela a provoqué de violentes rixes entre les Gaylords et les C-Notes, qui se retrouvaient au 4510 North Harlem Avenue devant Axle Roller Skating Rink (une patinoire pour roller qui a fermé depuis) pour en découdre. Ces bagarres ont fait couler tellement de sang, que la survie de l’alliance était impossible. Si bien que les GL, ne respectant plus les règles de l’entente, se sont mis à ouvrir de nouveaux territoires dans le quartier de Montclare, qui appartenait aux C-Notes. Tout le monde avait compris que c’était la fin de l’alliance et donc les affrontements ont continué à Smith Park et dans le secteur de Dunning. Ces guerres étaient dans le but de contrôler ce qu’ils appelaient à l’époque le « White Wonderland« . Cette zone s’étendait de Portage Park à Dunning et était uniquement constitué de familles blanches de classe moyenne. Ces zones n’étaient pas habitué à cette violence donc les GL et les C-Notes ont rapidement attiré l’attention des forces de l’ordre.

Axle Roller Skating Rink

En 1983, le puissant set de St Louis Avenue et Altgeld Street s’est dissout, sûrement à cause d’une embrouille interne. Pour que les membres ne s’entre-tuent pas, ils se sont dispersés un peu partout dans les autres factions Gaylords. En 1983, l’intégration des Gaylords à la People Nation fut officielle et ils ont donc commencé à utiliser les logos de celle-ci (étoile à 5 ou 6 branches). Depuis 1981, les Gaylords avaient arrêté de combattre les Latin Kings, mais ils s’évitaient à tous prix et se détestaient quand même. En 1983, cela a donc été dur pour la majorité de se serrer la main lors des réunions et des rassemblements. Les Gaylords de Lincoln Park ont d’ailleurs refusé de serrer la main des LK et de défendre l’étoile de la People. D’ailleurs, la nouvelle génération de ce set se faisait punir lorsque les anciens les voyaient tagger des symboles de la People Nation. Cette haine a contraint les anciens à fermer le set en 1985, car ils ne supportaient pas de voir les jeunes serrer la main des Latin Kings. On peut estimer que durant les premières années, seulement 20% des Gaylords étaient contents de cette entente et traînaient souvent avec des Latin Kings, des Vice Lords et des Insane Deuces.

Durant le milieu des années 80, les Gaylords continuaient de créer de nouvelles factions, même si leur nombre commençait à baisser. Ils se sont aventurés dans le secteur de BelmontCragin, à nouveau, car les familles blanches désertaient de plus en plus la zone, au profit des latinos. Et, malgré le fait qu’ils représentaient tous la People Nation, les GL se sont battus contre des Latin Brothers, des Latin Kings et des Latin Pachucos.

En 1985, les Gaylords recrutaient de moins en moins de membres et certains d’entre eux switchaient vers d’autres gangs alliés. Cela est dû au fait que les Black Gangster Disciples et les Vice Lords ont ouvert leurs portes aux membres de toutes origines, et non plus seulement aux afro-américains. Les VL et les BGD étaient les deux plus gros gangs de la ville donc les jeunes blancs et latinos étaient excités à l’idée de rejoindre de tels empires. De plus, les gangs hispaniques (qui eux acceptaient déjà les blancs dans leurs bandes) tels que les Latin Disciples, les Latin Kings, les Imperial Gangsters, les Satan Disciples ou les Two Six ont intensifié leur recrutement et cherchaient activement de nouveaux membres. Les jeunes blanc croyaient plus en ces organisations qu’en les Gaylords pour l’avenir, étant donné qu’elles gagnaient beaucoup plus d’argent grâce au trafic de drogue. Rejoindre les GL était devenu ringard pour ces enfants blancs, pauvres, et coincés dans des quartiers délabrés.

En 1986, les derniers sets Gaylords ont ouvert en ville : deux dans le secteur d’Hermosa et un à Irving Park. Les GL d’Irving Park se sont ensuite développés à Addison, une bourgade en banlieue de Chicago. Le milieu des années 60 signe aussi la fin de l’aventure des Gaylords dans le quartier d’Austin. En effet, le quartier est devenu afro-américain à 80% (90% en 1990) et le groupe situé au croisement entre South Avenue et Central Avenue s’est éteint. Les deux autres sets de la zones furent évacués et les membres furent relogés dans d’autres parties de la ville.

Durant la fin des années 80, les Gaylords ne se sont plus développés et chaque set a même commencé à perdre des membres. Cela s’explique de plusieurs manières : certains mourraient à petit feu à cause de leur addiction à la drogue, il y avait de plus en plus de membres en prison, certains ont switch de gang (vers les Latin Kings pour la plus part), d’autres ont déménagé en banlieue ou ont quitté la vie de gang. En effet, ceux qui avaient rejoint le gang en tant que jeunes pauvre étaient devenus des adultes aisés. Ainsi, il y a beaucoup de Gaylords qui ont déménagé en périphérie de Chicago, pour offrir une meilleure vie à leur famille. Les GL ne cherchaient donc plus à gagner du terrain, leur nouveau challenge était de garder ce qu’ils avaient.

Le début des années 90 a été une période critique pour les Gaylords. En 1990, les Gaylords ont décidé de fermer un bon nombre de sets. Par exemple, ils en ont fermé huit rien qu’à Logan Square, dont celui des puissants Palmer Gaylords (PGL) situé au croisement entre Palmer Street et California Avenue. Cette décision fut prise car le secteur était devenu composé à 66% de latinos, et la nouvelle génération de jeunes blancs préférait rejoindre des gangs hispaniques.

Hermosa n’échappait pas à ce changement démographique, ainsi le secteur était devenu latino à 70% et cela ne faisait qu’accélérer. Les Spanish Cobras et les Imperial Gangsters contrôlaient Kelvyn Park, alors que les Maniac Latin Disciples et les Latin Kings se partageaient le reste de la zone. Les Gaylords et les Freaks, en sous-nombre ont préféré fuir la zone plutôt que continuer cette guerre vouée à l’échec. C’est au total six sets qui ont fermé à Hermosa. Un certain nombre de factions se sont dissoutes dans le secteur de BelmontCragin ainsi que le set de Dunham Park (secteur de Portage Park).

Les factions qui avaient été épargnées par « la grande fermeture » de 1990 ont souvent fermé quelques années plus tard. L’addiction, les incarcérations et les retraites balayaient les sets un par un, et ce partout en ville. Les alliés devenaient aussi une menace, comme par exemple les Latin Kings et les Black P. Stones qui venaient vendre de la drogue sur le territoire des Gaylords (car il était inoccupé et ils étaient en sécurité. Cela a augmenté le nombre de toxicomanes dans les rangs des GL et a incité certains membres à rejoindre le trafic et donc, souvent, à finir en prison (car il faut bien se rappeler que le but des GL était de prendre soin de leur communauté et non de vendre de la drogue). Un autre exemple concret est quand les BPS ont demandé aux Gaylords de l’intersection entre Sunnyside Avenue et Magnolia Avenue s’ils pouvaient vendre de la drogue et jouer au basket sur ce corner en échange d’un renforcement des liens entre les deux groupes. Les GL ont tout naturellement accepté car les BPS étaient membres de la People Nation, sauf que la plupart des membres ont fini en prison à cause de ce trafic. Pour couronner le tout, « Geronimo« , un Gaylord de ce set, fut tué par un BPS de 14 ans (on ne sait pas s’il a agit pour des raisons personnelles ou si cela avait été fait pour accélérer la mort du set GL et ainsi récupérer le territoire).

Geronimo

Durant le milieu des années 90, on a pu assister aux derniers affrontements et massacres de la part des Gaylords. N’ayant plus rien à perdre et donnant tout pour garder le peu de territoire qu’il leur restait, les GL se sont concentrés à Sayre Park. Mais les Latin Brothers et les Insane Deuces étaient bien décidés à récupérer la zone. Il y eu alors de terribles bains de sangs entre les trois gangs, ce qui força les Insane Dragons à battre en retraite. Les Latin Brothers et les Gaylords ont décidé d’une paix car ils étaient tous deux membres de la People Nation et car les Latin Brothers sont partis vers d’autres secteurs, plus simples à conquérir.

Durant la fin des années 90, il y eu toujours plus de départs et ils perdaient énormément de membres.

En 2000, un grand nombre de sets ont fermé à Portage Park et ils y ont notamment perdu le contrôle de Merrimac Park. Pour faire simple, la plupart des sets ont fermé, sauf ceux de Kilbourne Park et de Sayre Park, qui sont encore actifs de nos jours.

Aujourd’hui, même si les Gaylords ne possèdent presque plus aucun territoire, ils sont toujours là et s’occupent de leurs familles en travaillant de manière légale. Comme à l’époque, les Gaylords d’aujourd’hui prennent soin de leur communauté et de leurs voisins. Cela est honorable et se doit d’être souligné, alors que la guerre des gangs déchire la ville de Chicago.

Organigramme des Gaylords

Nous ne nous sommes pas penchés sur l’organisation du groupe. Contrairement à beaucoup d’autres gangs, les Gaylords n’ont jamais eu de véritable leader qui contrôlait le gang en entier. En effet, chaque set avait un ou deux chefs, et une hiérarchie propre. Les Présidents de chaque section se retrouvaient très souvent pour débattre et se mettre d’accord sur les directives à suivre, les guerres à déclencher et les paix à signer. Les Warlords et les War Chiefs étaient chargées de diriger les troupes et de faire appliquer les consignes du président.
Les catégories d’age n’étaient pas fixes et cela dépendait de qui vous avait initié. Pour rentrer dans le gang, il fallait combattre deux Gaylords pendant deux minutes. Néanmoins, les jeunes qui avaient déjà fait leurs preuves autrement dans la rue n’avaient pas besoin d’être initiés. Mais comme je l’ai dit, les catégories n’étaient pas fixes et il n’était pas rare de voir des Pee Wees trainer avec des Seniors. C’est pourquoi les Gaylords ont fini par supprimer ce système, sauf pour les Midgets qui eux restaient à part car : << ils étaient beaucoup plus jeunes que nous et attiraient bêtement l’attention de la police. du coup quand on trainait au parc, on les laissait à l’école >> (témoignage d’un ancien Gaylord).

Il y a encore énormément de choses à dire et chaque set pourrait avoir son propre petit article mais nous n’allons pas plus développer cette histoire qui est déjà assez compliquée.

AUTEUR

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